Portrait

“ Face aux déchets marins, j’ai décidé d’agir à mon niveau ”

À force de les croiser en nageant dans la Méditerranée, Emmanuel Laurin a commencé par ramasser les déchets marins. Puis il a créé la marque de bijoux recyclés : Sauvage. Son objectif : ouvrir un démonstrateur grand public du recyclage des déchets sauvages.


Emmanuel n’a pas peur de se mettre en scène pour convaincre. Sa marque de bijoux, Sauvage, porte le même nom qu’un célèbre parfum ? Il pastiche sa publicité pour expliquer son projet. Il souhaite sensibiliser le plus grand nombre au respect du littoral juste avant l’été ? Il embarque les bénévoles et partenaires de l’association dans un remake très efficace du clip « Basique » d’Orelsan qui devient… « Plastique ».

Le trentenaire, arrivé en 2015 sur les rives de la Méditerranée par amour, n’a pas oublié son expérience dans l’événementiel à Dijon. Mais ce n’est pas pour reproduire sa vie bourguignonne qu’il migre à Marseille : « J’ai tout remis à zéro. J’ai fonctionné par constat et par désir d’agir à mon niveau. » Il découvre la nage en eau libre et… le fléau des déchets sur le littoral. À chaque nage dans les calanques, il récupère ce qu’il peut dans un sac flottant. En 2017, il organise l’opération Le Grand Saphir : 120 km à la nage entre Marseille et Toulon, accompagné de deux kayaks et d’un voilier pour collecter et caractériser les déchets. Bilan : quasiment 1 kg collecté au kilomètre, dont 90 % sont des plastiques. Un an plus tard naît Sauvage, une marque de bijoux confectionnés à partir de ces déchets : filets de pêche, verre poli, plastiques, canettes…

Des opérations de sensibilisation

« Sauvage est une marque associative, précise Emmanuel. Nous avons une activité commerciale mais nous avons choisi le statut associatif, pour garantir nos valeurs de partage. On fait de l’open source, et la non-lucrativité est le fondement de notre fonctionnement. » Sauvage travaille avec une vingtaine d’associations qui lui cèdent une part des déchets qu’ils collectent en échange d’une part du chiffre d’affaires (5 000 euros en 2021). Le reste finance les actions de sensibilisation telle que l’opération Déchets d’or, une chasse au trésor qui a réuni 600 personnes sur les plages pour retrouver un coffre en plastique recyclé contenant 50 bijoux et 1 000 euros à reverser aux associations de collecte.

Une recyclerie en projet

Sur le plan technique, l’association s’appuie sur le réseau Precious Plastic, qui réunit une quinzaine d’ateliers en France partageant leurs innovations low tech de revalorisation des plastiques. La particularité de Sauvage est de ne traiter que des déchets dits sauvages. « Ils ont été dégradés par le soleil, le sel, le sable ce qui nous a conduits à adapter les process pour éviter d’endommager les machines comme les broyeuses. »

Prochaine étape : ouvrir en 2022 une recyclerie dédiée aux déchets sauvages. Le projet a déjà fait l’objet d’une étude de faisabilité soutenue par l’ADEME. Il ne manque plus que le lieu. Convivial, sur un port, à proximité des calanques où tout un chacun pourrait confectionner des objets recyclés. « J’y vois des ateliers, un espace de restauration et pourquoi pas un petit musée du déchet sauvage ! s’enthousiasme Emmanuel Laurin. L’objectif est de s’engager sans oublier le côté ludique. »

Bio

2015

Emmanuel Laurin quitte Dijon pour Marseille.

2017

Opération « Le Grand Saphir », 120 km de nage entre Toulon et Marseille.

2018

Création de l’association Sauvage Méditerranée